Le 07 décembre dernier, lors de la 2ème édition du Bonial Day, Laurent Landel, Président de Bonial, est revenu en introduction sur les événements qui ont marqué l’année 2023 dans le secteur du retail.
Le 7 décembre dernier, les décideurs et acteurs du retail se sont réunis pour échanger sur les sujets d’actualité, qui impactent directement le commerce au quotidien.
“La raison d’être de ce Bonial Day c’est de s’autoriser ce pas de recul, sur ce qui se passe dans cet univers passionnant qui est celui du commerce parce qu’en comprenant le passé et le présent, on a de meilleures chances d’anticiper et de se préparer à ce qui nous attend demain.” explique Laurent Landel, en introduction.
Au total, une vingtaine d’experts se sont réunis pour échanger sur plusieurs thématiques, lors de tables rondes et interviews :
Comme l’expliquait Rami Baitiéh, ancien Directeur Exécutif France de Carrefour, en période d’inflation il est nécessaire de regarder les volumes plutôt que la valeur, floutée par le contexte de crise économique : “Et donc, force est de constater en 2023 des volumes en baisse, face à une consommation très largement sous contrainte”, constate Laurent Landel. Ainsi, près d’ un tiers des Français déclarent avoir des difficultés à boucler leurs fins de mois et près de la moitié (48%) estiment ne pas avoir les moyens de se faire plaisir (Baromètre "Du pouvoir d'achat au vouloir d'achat, la relation des Français avec la consommation, vague 7, août 2023).
En conséquence, il n’est pas étonnant de voir que, pour les Français, lorsqu’il s’agit de choisir le lieu d’achat, les principaux critères d’évaluation sont en premier lieu les prix pratiqués (93% jugent ce critère très ou assez important) suivi des promotions (88%) (Etude "Le Commerce alimentaire en 2023", juin 2023). Des critères qui sont devenus primordiaux pour les consommateurs, afin de préserver tout ou partie de leur pouvoir d’achat.
“En grande distribution, on constate également l’attrait grandissant des Français pour les MDD (Marques De Distributeurs) mais aussi les hard discounters qui ont gagné, ces derniers mois, d’importantes parts de marché”, confirme Laurent Landel.
Par ailleurs, force est donc de constater que les Français effectuent de plus en plus d’arbitrages concernant leurs achats, y compris sur les produits essentiels : sur les 9 catégories alimentaires sondées, il n’y en a que trois seulement où la qualité prévaut sur le prix : à savoir la viande et le poisson, les fruits et légumes et les produits laitiers et les oeufs (Etude "Le Commerce alimentaire en 2023", juin 2023). Pour le reste - les produits surgelés, les boissons avec ou sans alcool, ou encore pour l’épicerie sucrée ou salée, la considération du prix passe devant ! Même constat pour les produits Bio, ce qui peut paraître paradoxal, puisqu’il s’agit avant tout d’un choix qualitatif. Comment peut-on alors continuer à réussir ce challenge du “mieux manger” sans le sacrifier au profit du prix ?
Enfin, même au moment de Noël, le choix du lieu pour faire ses cadeaux est majoritairement influencé par les prix proposés par les enseignes, devant le choix des produits proposés, la proximité géographique et même les délais de livraison ou de retrait (Baromètre "Les Français et les achats de Noël", novembre 2023).
Les prix et promotions restent donc très attendus par les Français pour continuer de consommer.
Le prospectus reste un des principaux vecteurs de diffusion des promotions mais la transition digitale s’est faite : 73% des Français déclarent souhaiter recevoir les promotions sur le digital vs 40 % en boîtes aux lettres (Etude "Le Commerce alimentaire en 2023", juin 2023). Une transition media de la communication commerciale s’est donc opérée puisque le digital ne constitue plus un élément complémentaire aux communications en boîtes aux lettres, mais bien l’inverse. Preuve en est, l’initiative pionnière de Cora, après des enseignes ultra-urbaines comme Monoprix, qui ont décidé d’arrêter la diffusion du prospectus papier.
"Les points d’image prix et d’image promo que vous (distributeurs) gagnerez se traduiront probablement en gain de part de marché à court terme. Donc être capable de reconstituer le bon mix de communication qui doit permettre de faire valoir les promos, c’est un gage de conquête client." indique Laurent Landel.
Au-delà du mix-média, les distributeurs vont devoir faire évoluer leur modèle économique car : "les parts de marché de demain ne se gagneront plus uniquement sur la vente de produits neufs" indique Laurent Landel. Le seconde main explose, comme le traduisent les résultats des plateformes spécialisées dans la vente de ces produits. Le sujet de la “déconsommation” a été récemment traité par l’ADEME qui a entrepris une action de sensibilisation forte, en diffusant en fin d’année des spots mettant en scène des “dévendeurs” qui, face aux demandes des clients en magasin pour choisir entre deux produits, leur conseillaient plutôt de ne rien acheter. Une initiative destinée à éveiller les esprits quant à l’importance de diminuer sa consommation, même au moment des fêtes.
“Cette question de la moralisation de la consommation et de la déconsommation est à traiter de façon beaucoup plus générale en se posant la question du rôle du commerce et son utilité dans la société pour 2024.” précise Laurent Landel.
Les résultats de la dernière étude "Les Français, le commerce et la grande distribution”, montrent que les magasins continuent d’incarner le commerce et représentent pour les Français un élément structurant du quotidien : 87% jugent qu’ils sont importants pour la vie locale, 84% qu’ils ont un rôle social à jouer et, dans les mêmes proportions, qu’ils participent au développement économique de la France. Les évolutions en baisse par rapport à la 1ère vague de l’étude démontrent une certaine frustration de la part des Français avec un vouloir d’achat en décalage avec leur pouvoir d’achat qui impacte directement leur perception de la grande distribution.
La proximité entre les Français et le commerce traduit des attentes très fortes qui vont bien au delà de l’aspect transactionnel. La vocation du commerce est également aujourd’hui d’ endosser un véritable rôle sociétal et participer à un monde de demain plus engagé tant en faveur de l’environnement que sur un prisme de la solidarité. Cette 2ème édition du Bonial Day a d’ailleurs donné lieu à une table ronde dédiée à l’initiative du Café Joyeux, un réseau solidaire de café-restaurants qui forme et emploie des personnes en situation de handicap.
Enfin, la démocratisation des usages de l’intelligence artificielle et, en particulier de l’IA générative va très certainement marquer le début d’une nouvelle ère du commerce, où le quotidien des métiers tant de la communication commerciale et promotionnelle qu’en magasin va évoluer. Reste à savoir comment et quelle place vont prendre les processus de robotisation et d’automatisation par rapport à l’humain ? Des outils comme ChatGpt laissent déjà entrevoir d’importantes possibilités d’évolution. C’est aussi, potentiellement de nouveaux modes organisationnels qui se profilent, entre dirigeants et postes opérationnels augmentés par l’IA.